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Alexey

Le jet de la douche n’arrange en rien ma colère. Il faut que je me calme et très vite sinon tout va partir en vrille. Déjà, depuis deux semaines, question dérapages, on a atteint des sommets !
Putain, du calme ! Je vais retourner chez elle et m’excuser, on repartira sur de bonnes bases.
Et puis merde, non !
Je suis redevenu un queutard à ses yeux. Je veux bien être gentil, mais faut pas abuser non plus !
Elle voulait de l’arrogance. Ok, je vais lui en donner ! Elle va se rendre compte qu’elle n’avait aucun droit de me parler comme ça !
Pour le coup, je me suis vraiment senti pire qu’une merde, je culpabilise assez sans qu’elle en rajoute !

 

Je suis en train de me sécher lorsque j’entends qu’on tape à ma porte. J’enroule une serviette autour de mes hanches et sors de la salle de bain.
-« Oui ! » tonné-je.

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-« C’est Keiji, je sais plus où j’ai mis le double des clés. »
-« J’arrive. »
J’ouvre la porte sur Keiji et… la mère de Niki qui me jette un regard dubitatif.
Eh merde ! C’est pas ma journée.
-« Excusez-moi Elisabeth, je pensais que Keiji était seul. » expliqué-je.
-« J’en ai vu d’autres, Alex. D’ailleurs, vous feriez un magnifique modèle dessin. Puis-je entrer ? »

 

Je la laisse passer et lance un regard furieux à mon ami qui se retient de rire. Elle examine d’un oeil attentif mon appartement. Je m’excuse et demande à mon pote d’offrir quelque chose à boire à Elisabeth pendant que je m’habille. Lorsque je reviens dans le salon, Elisabeth et Keiji rigolent ensemble. Apparemment, elle est complètement remise de toutes les émotions de ces deux dernières semaines et aussi de la dispute de tout à l’heure. Contrairement à moi.

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-« Vous vouliez me parler ? » questionné-je.
-« Oui Alex, comme vous le savez, Nikita va mieux et je pense qu’il est temps que je rentre chez moi. Je vais donc aller chercher mon billet de train tout à l’heure. »
-« Elle a encore besoin de vous, Elisabeth. Je crois que ce qu’il s’est passé tout à l’heure est une méprise, Niki a… »
-« A besoin de vous, Alex ! » me coupe-t-elle.

 

Non, là elle se goure. Ce dont Niki a besoin, c’est de se sentir protégée. Elle a besoin de sa mère. Moi, je ne suis que son mec. Je peux pas lui amener le dixième de tout ça.
-« Vous avez besoin de vous retrouver tous les deux. Je suis allé rendre visite au médecin qui s’est occupé de Niki. Je lui ai tout expliqué, l’après agression, l’arrestation et votre relation. Il a compris tout de suite votre problème à tous les deux. »
-« Notre problème ? Elisabeth, malgré tout le respect que je vous dois, c’est votre fille qui s’est faite agressée. Je vais très bien, comme vous pouvez vous en rendre compte. »
-« Nikita est doublement touchée, je vous l’accorde. Elle subit le traumatisme physique et psychique en même temps, tandis que vous êtes en plein stress post-traumatique. »
-« Quoi ? Vous plaisantez ? Vous êtes en train de me dire que j’ai des troubles anxieux ? » m’esclaffé-je.
-« Ne riez pas. C’est un effet tout à fait normal après ce qui vient d’arriver. Le médecin m’a très bien expliqué les symptômes et je suis certaine que votre problème à tous les deux vient de là. »

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-« Je comprends mieux ton changement de comportement, ce stress post-machin expliquerait ta mauvaise humeur. » me balance Keiji.
-« Je suis pas de mauvaise humeur ! » dis-je pour me défendre de la déclaration de mon ami.
-« Pas du tout, mon pote ! Juste avant-hier, tu as viré Anouk, qui venait faire ton ménage, comme une malpropre. C’est vrai que ça te ressemble beaucoup. »
-« J’aidais la police à arrêter la meurtrière de Niki ! Je pense que j’avais autre chose à foutre que de penser au ménage de mon appartement ! »

-« Ma fille n’est pas morte, il me semble. » dit madame Steal.
-« Quoi ? Ben non, encore heureux. » répondis-je.
-« Vous parlez de meurtre, mais il n’y a pas eu de crime donc il n’y a pas de meurtrière, vous êtes bel et bien en état de stress, Alex. »
-« Je voulais dire la suspecte. » dis-je pour me reprendre.
-« Un SPT se produit dans deux cas : quand on le subit ou alors lorsque l’on a été témoin, ce qui est votre cas. Le plus important est de s’en rendre compte très rapidement. Je ne savais même pas qu’en persistant le problème pouvait amener à une dépression. » dit-elle en s’adressant à Keiji.

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Ce dernier est très attentif aux explications qu’elle apporte.
-« Ces troubles débutent habituellement bien plus tard, mais il arrive dans certains cas, qu’ils commencent très rapidement, les symptômes sont variables, mais il ne faut pas se laisser entraîner plus loin. »
-« Comme cela affecte Alex et Niki. » confirme Keiji.
-« Non, mais arrêtez c’est n’importe quoi. » tenté-je de me défendre.
-« Le déni en fait partie d’ailleurs, ainsi que les problèmes d’endormissement ou d’insomnie, accès de colère, concentration, hyper vigilance et réactions exagérées… » énumère Elisabeth en souriant, très fière de sa réponse.
-« C’est tout à fait ce qu’il se passe. » affirme mon pote.

 

Je les regarde tour à tour, choqué par ce que je réalise enfin !
Je comprends mieux mon changement de comportement ces derniers jours. L’agression m’a entraîné dans un mal-être que je n’arrive plus à gérer. Mais comment oublier les images qui défilent dans ma tête, le souvenir de Niki ensanglantée…
Je suis resté en alerte pour m’assurer d'être prêt en cas de dangers réels ou irréels et Niki en a souffert. Je l’ai délaissée et ne lui ai pas apporter toute la tendresse dont elle avait besoin. Pensant bien faire, j’ai mis de côté ce qu’elle désirait pour me protéger.

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-« Je pense que vous avez compris, Alex. Pour information, j’ai décidé d’aller me promener au parc, ce soir. Je crois qu’il faut que vous parliez avec ma fille. »
J’opine tout en reprenant espoir. Le désarroi est passé. il faut aller de l’avant et apporter à Niki l’aide dont elle a besoin.

Nikita

Bon, il ne m’a pas répondu. Donc, soit il n’accepte pas mes excuses, soit il n’en a rien à faire.
L’un comme l’autre, c’est pas génial !

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A vrai dire, je me sens hyper seule dans cet appartement… et ma mère qui décide de partir. Pas grave qu’ils me fassent tous la tête s’ils le veulent, c’est moi qui ai subi tous ces problèmes, pas eux !
Je sais que ça fait très égoïste mais tant pis… Cette crise de nerfs était bien méritée, non ?
Je me suis renseignée sur ce que ma mère appelle le stress post-traumatique et j’ai pris une sacré claque en réalisant que je suis en plein déni, après cette tentative d’homicide à mon égard. Je refuse de me souvenir de cet événement. Mon inconscient laisse émerger ce que je ne veux pas admettre. Ce qui explique mes sautes d’humeur, mes troubles du sommeil et surtout mes cauchemars.

 

Merlin vient se blottir sur mes genoux, je le caresse machinalement. Lui au moins ronronne, je joue avec ses oreilles et il se tourne sur le dos quémandant mes caresses sur son ventre rebondi. Les animaux sont plus intelligents que les hommes et plus fidèles aussi.
Lorsque l’on frappe à la porte, je sursaute sur le canapé, Merlin se redresse, regarde la porte et ensuite moi, d’un air de dire : tu attends quoi pour ouvrir humaine ? Il saute par terre dans toute sa dignité et se poste devant la porte en me narguant. 
C’est con un chat en fait !

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Je regarde par le judas et entraperçois Alex. Mon coeur s’accélère, je ferme les yeux et reprends mon souffle histoire de me donner du courage. Dès que la porte s’ouvre, il rentre en trombe dans mon appartement, j’écarquille les yeux devant cette suffisance retrouvée.
-« Maintenant, tu m’écoutes ! Ok ? Et tu t’assois, il faut qu’on parle ! »
Je referme la porte et lui lance mon regard assassin, non, mais il se prend pour qui là ! C’est le nouveau style d’entrée en matière ?

 

-« Bon, j’ai merdé, je l’admets, mais j’ai vraiment eu la trouille de ma vie. Imagine toi à ma place… quand j’ai vu ce mec sur toi et tout ce sang… J’ai paniqué, putain j’ai vrillé… Et… »
-« La ferme ! »
Il me regarde éberlué.
-« J’étais là ! J’ai vécu tout ça, Alex, le film repasse inlassablement dans ma tête et le pire c’est la nuit. Je ne dors plus, je me réveille en sursaut, je tremble tout le temps… Je me suis faite agresser ! » crié-je.

Je sens la boule qui me noue les entrailles monter le long de ma gorge comme si j’allais vomir. Je me mets à gémir comme un animal. Les larmes coulent d’elle-même. Alex me prend dans ses bras et cale mon visage contre son épaule, je ne peux m’arrêter de pleurer, c’est plus fort que moi.

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Au bout d’un moment, il me soulève puis m’installe sur mon lit tout en s’allongeant à mes côtés. Je lui raconte mon ressenti et tout ce malaise qui est en moi, depuis l’agression.
Il fait de même de son côté, n’omettant aucun détail sur les deux dernières semaines, ainsi que sa participation au shooting photo.
J’écoute avec attention quand Alex me parle de son enfance, de son foyer, de l’amour qu’il portait à ses parents et de sa descente aux enfers avant de vivre dans l’opulence, la gloire et les feux de la rampe.
En fin de compte, j’ai toujours eu une vie très facile alors que, de son côté, rien n’a été simple.

 

-« Et quand ta mère est décédée, tu n’as rien pu faire ? » demandé-je, la tempête passée.
-« Que voulais tu que je fasse, je venais d’avoir 17ans. J’étais pas encore majeur, quand ma mère est morte, je connaissais rien à la vie et j’avais les services sociaux aux fesses. J’ai appelé l’ambulance et je me suis caché dans les endroits que je pouvais trouver et j’ai zoné. J’ai vécu dans une cité pas très bien fréquentée, en échange d’un logement j’ai vendu de la drogue, mendié ou volé des sacs à l’arraché, jusqu’à ce que je rencontre Olga et qu’elle devienne mon agent. »
-« T’es un vrai dure à cuire ! » dis-je en souriant.
-« Pas autant que toi ! Mon estomac se souvient de ton crochet du droit ! » ironise-t-il.
-« Tu l’avais cherché. Quelle idée de m’embrasser de force ? »
-« C’est vrai, j’avoue, mais bon tu étais hyper séduisante ce jour-là. » dit-il le regard rêveur.
-« Dis tout de suite que je ressemble plus à rien ! »

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Il jette un regard dubitatif à ma tenue. Bon ok, mon pyjama n’est pas à proprement parler très sexy.
-« Je m’en fous que tu portes un pyjama tue-l’amour, ce qui est important pour moi c’est que tu sois là, j’ai vraiment besoin de toi. »
-« Tu sais quoi, je crois que c’est la plus belle déclaration que l’on m’ait jamais faite. Je ne serai jamais une de tes bimbos siliconées et refaites des pieds à la tête. Je te le dis d’avance, Alex, j’ai un caractère de merde, j’aime être organisée, je ne peux pas vivre sans des limites et des repères. Si tu oses te foutre de ma gueule, je te rendrai la vie impossible au point que tu deviendras fou. »
-« Jamais. »
-« Tu crois que j’en suis pas capable ? »
-« Oh si, ça j’en suis complètement certain. Mais vu que je suis déjà dingue de toi, je ne crains plus rien. » me déclare-t-il en m’embrassant.

 

Je souris et lui rends tendrement son baiser. Il mordille ma lèvre inférieure, j’ouvre ma bouche, nos langues se cherchent et se trouvent avec délectation.
Je suis sur un petit nuage et je comprends que le plus dur est passé, autant pour lui que pour moi. Je me sens fondre lorsque ses lèvres jouent avec le lobe de mon oreille. Il est redevenu celui que je connais et non un faux-semblant de lui-même. Sa main remonte doucement le long de mon ventre jusqu’à mes seins. Je soupire d’avance.

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La peau de ma joue est éraflée par la barbe naissante qui marque sa mâchoire, tandis que ses lèvres embrassent la courbe de mon cou jusqu’à mon épaule. Je commence à avoir très chaud et alors que je m’apprête à enlever mon haut j’entends une voix résonner dans mon appartement.
-« Je suis rentrée ! »
Ma mère, évidemment ! Alex me regarde en me gratifiant d’un sourire machiavélique.
-« Pas avec ma mère à côté… » le sermonné-je en chuchotant.
Il m’embrasse le nez et se lève en haussant les épaules avec désinvolture.

 

Ma mère est ravie de nous voir sortir de la chambre enlacés et nous le fait bien comprendre.
-« C’est bien mieux comme ça, non ? » assure-t-elle.
-« Merci, maman. »
-« Bon eh bien, je vous laisse, il est tard et mon train part à onze heures. Vous m’accompagnerez ? »
-« Bien sûr, Elisabeth, n’est-ce pas Niki ? »
A vrai dire, je n’ai aucune envie de me retrouver dans un lieu public. Je m’abstiens néanmoins de tout commentaire et me dis qu’Alex sera près de moi. Ma mère a dû se rendre compte de mon malaise.
-« Chérie, si c’est trop tôt pour toi, je comprendrais. »
-« Non, maman, ça va aller et puis je serai pas toute seule, mon chéri sera là ! » déclaré-je.

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Je remarque qu’Alex a apprécié le petit nom que je viens de lui donner, je décide de le taquiner.
-« Ne sois pas si heureux, tu mériterais que je t’appelle enfoiré. » marmonné-je avec une moue boudeuse.
Je comprends à son haussement de sourcils et à son air peiné qu’il se sent mal et ne sais pas trop quoi répondre.
-« Je ne parle pas de ton éloignement là. T’as même pas répondu à mon texto alors que tu savais que tu venais chez moi. »
-« Hein ? Quel… »

 

Il sort son portable de sa poche et je vois qu’il découvre le message que maintenant, son air étonné ne ment pas. Il se retourne vers moi et m’embrasse tendrement.
-« Désolé mon coeur, j’avais pas vu… » explique-t-il.
-« C’est bon pour cette fois-ci, mais la prochaine fois, je te jure que je me fâche réellement. Ok? »
-« Je crois que j’ai eu un aperçu tout à l’heure de ta colère, je ferai attention. »
Ma mère s’esclaffe devant la mine perplexe d’Alex.
-« Mon pauvre Alex, je crois que vous ne vous rendez pas compte sur quelle femme vous êtes tombé. »

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-« Je crois aussi. » répond-il pour me taquiner à son tour.
Il nous souhaite une bonne nuit et rentre chez lui. Je me mets au lit tout en souriant de notre réconciliation. Je prends mon oreiller et respire son parfum épicé qui embaume la taie.
Mon portable vibre, c’est un message d’Alex :

 

    Tu es importante pour moi aussi… bonne nuit mon coeur.

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